StimNut : une recherche-action communautaire innovante de stimulation psychosociale pour améliorer la prise en charge des enfants sévèrement malnutris à Koutiala, Mali

Vendredi 13 octobre 2023 - Mis à jour le Jeudi 4 janvier 2024
La malnutrition chez les jeunes enfants peut avoir des conséquences à long terme et potentiellement irréversibles, notamment sur le plan cognitif. Apporter des soins nutritionnels et un traitement médical aux enfants malnutris ne suffit pas, une stimulation psychosociale s’avère aussi nécessaire : c’est l’objet de l’étude StimNut qui vise à adapter cette approche au contexte malien et la mettre en œuvre.

La malnutrition aigüe seule ou en association avec d’autres pathologies - paludisme, diarrhées, maladies des voies respiratoires, infections dites opportunistes -, reste l’une des premières de cause de mortalité des jeunes enfants au Mali. En 2022, les prévalences de la malnutrition aigüe globale et sévère étaient respectivement de 11,5% et 2,6% dans le district sanitaire de Koutiala (1).

Au-delà de la prise en charge nutritionnelle

La prise en charge des enfants malnutris repose sur un traitement médical et des soins nutritionnels. Mais la malnutrition aigüe sévère (MAS), en particulier au cours des 1000 premiers jours de la vie, entraîne d’autres conséquences graves, à savoir une vulnérabilité accrue aux infections et aux maladies, un accroissement de la mortalité précoce et des déficiences moteurs et cognitives, associées à des troubles du comportement et de la communication.

La stimulation psychosociale précoce des nourrissons défavorisés peut avoir des effets bénéfiques à court et à long terme sur le développement cognitif et social. Les programmes à composantes multiples, incluant soins, traitement nutritionnel et stimulation psychosociale, se sont révélés très efficaces pour améliorer la réadaptation des enfants souffrant de malnutrition aiguë sévère (MAS). L'étude STIMNUT évalue la faisabilité de l'intégration d'une version adaptée du protocole "Follow-Up of Severe Acute Malnourished (FUSAM)" (2) développé par Action Contre la Faim dans le programme développé par Médecins Sans Frontières (MSF) à Koutiala (Mali) pour la prise en charge des enfants atteints de MAS âgés de 6 à 23 mois et leur famille.

  1. Sagara JA. Indicateurs de santé chez les enfants de moins de 5 ans dans le district Juillet 2022 Rapport d’enquête. Epicentre. MSF; 2022.
  2. Le Roch K, Tofail F, Bizouerne C. Research Brief FUSAM : A Nutrition and Psychosocial trial for Treatment of Children with Uncomplicated Severe Acute Malnutrition in Nepal. Action Contre la Faim; 2018. 

Les premiers résultats

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Stimnut : une recherche-action communautaire innovante de stimulation psychosociale pour améliorer la prise en charge des enfants sévèrement malnutris à Koutiala, Mali | Claire Bossard & Aissatou Diallo

Méthodes

Une étude mixte a été mise en œuvre entre juillet 2022 et mai 2023 dans deux centres sanitaires ambulatoires et à l'hôpital général de Koutiala.

Une adaptation du cadre conceptuel PRECEDE-PROCEED a été utilisée pour adapter, mettre en œuvre et évaluer l'intervention de stimulation psychosociale. L'étude a été divisée en 3 phases successives :

  • Un état des lieux initial  au niveau communautaire,
  • L'adaptation contextuelle du protocole FUSAM par le biais d'une par une approche dérivée de la recherche action participative (RAP) et
  • L’implémentation de l’intervention adaptée et l’évaluation de sa faisabilité et de son acceptabilité.

Des données quantitatives et qualitatives ont été collectées lors des phases 1 et 3 auprès de différents interlocuteurs : des parents d’enfants atteints de MAS, des personnels de santé concernés par la prise en charge nutritionnelle des enfants, les travailleurs psychosociales ayant délivré les sessions, etc.  Ces données ont ensuite été analysées et interprétées simultanément. Au cours du processus de RAP, diverses parties prenantes, y compris des travailleurs sociaux, des professionnels de la santé, des parents d'enfants atteints de MAS, des guérisseurs traditionnels, des représentants de ministères et d'autres ONG ont travaillé ensemble pour adapter concrètement l'intervention. Plus de 50 personnes ont participé à ce processus lors de réunions de travail modérées par une l’association malienne d’éveil et de développement (AMEDD).

 

RÉSULTATS

Les résultats de la première phase ont été utilisés pour éclairer la manière d'adapter l'intervention au cours de la deuxième phase. Le processus de la RAP a abouti à trois types de résultats : le manuel FUSAM a été adapté au contexte de Koutiala en prenant en compte les pratiques et coutumes locales ; Des recommandations pour la mise en place de l’intervention ont été faites par les comités avec par exemple l’intégration d’une cérémonie de lancement pour impliquer les décisionnaires de foyer et la communauté. Enfin, ce processus également permis la sensibilisation et l’appropriation de l’intervention par les autorités, les décideurs locaux et les agents de santé.

Au cours de la phase 3, un total de 149 séances de stimulation psychosociale (122 individuelles et 27 collectives ; 18 sessions à l’hôpital et 131 au niveau des cscom) ont été dispensées de manière hebdomadaire aux 36 familles incluses par l’équipe de 3 travailleuses psychosociales (TPS) supervisées par une formatrice psychologue en ligne. Huit autres accompagnants (mari, neveu, beau-frère, beau-père, oncle) ont assistés à une ou plusieurs sessions avec la mère.

L’intervention a globalement été très appréciée par les mères, les accompagnants principaux et les personnes ayant délivré l’intervention. L’acceptabilité des séances de stimulation psychosociale par les mères s’est renforcée au fur et à mesure de l'intervention en raison des changements positifs observés dans le bien-être de leurs enfants, dans leur relation avec celui-ci et dans leur relation avec leur entourage proche (mari et famille élargie). L’expérience StimNut a d’autre part été une ressource essentielle dans la déconstruction des préjugés des personnels de santé vis-à-vis des mères d’enfants MAS et dans la construction d’une relation de confiance entre soignant et soigné.

Les résultats ont montré que l’intégration d'une intervention psychosociale dans un programme nutritionnel existant était réalisable dans un pays à faible revenu et à revenu intermédiaire, en partenariat avec les acteurs locaux et les professionnels de la santé, et est fortement encouragée. Ce genre d’initiative vise à renforcer les dispositifs de soins liés à la nutrition infantile et mérite d'être poursuivi.

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