Fièvre jaune
Fièvre jaune : une maladie transmise par les moustiques
La fièvre jaune est une maladie virale aiguë transmise par les moustiques des espèces Aedes et Haemogogus. On estime que la maladie tue entre 30 000 et 60 000 personnes par an. La maladie est endémique en Afrique et en Amérique Centrale et du Sud. La majeure partie des cas annuels de fièvre jaune - estimé à près de 200 000 - surviennent l’Afrique où les flambées épidémiques sont fréquemment constatées. Elle présente en outre un risque pour les personnes qui voyagent dans les 44 pays endémiques d'Afrique et d'Amérique centrale et du Sud.
Dans les forêts tropicales humides, la fièvre jaune affecte les primates, principal réservoir de la maladie ; c’est lorsqu'ils sont piqués par un moustique infecté que les humains travaillant ou voyageant dans ces forêts sont infectés. On parle de fièvre jaune selvatique. Cependant, ces moustiques sont également bien adaptés aux environnements domestiques de l’homme, facilitant la transmission entre les personnes infectées et non infectées dans les villages comme dans les grandes zones urbaines. Ainsi, des cas sporadiques peuvent conduire à de grandes épidémies lorsque des personnes infectées se déplacent vers des zones densément peuplées où un pourcentage élevé de la population n'est pas immunisé.
Des symptômes non spécifiques tels que fièvre, douleurs musculaires, maux de tête, nausées ou vomissements apparaissent trois à six jours après avoir été piqué par un moustique infecté. Les symptômes peuvent être très modérés et l'infection peut alors passer inaperçue. Le diagnostic demeure parfois difficile à établir aux stades précoces car les symptômes de la fièvre jaune peuvent être confondue avec ceux d’autres pathologies. La plupart des gens se rétablissent au bout de 3 à 6 jours, mais environ 15 % des personnes infectées entrent dans une phase toxique et présentent un syndrome de défaillance multiviscérale affectant le foie, les reins et le système cardiovasculaire.
Vaccins : très efficaces mais pénurie de stocks
Il n'existe pas de traitement antiviral efficace contre la fièvre jaune. Seul le traitement des symptômes, fièvre, vomissements et douleur, peut être proposé pour améliorer la survie. Les personnes guéries possèdent une immunité à vie. Cependant, il existe des vaccins très efficaces qui offrent une protection à long terme. L'immunisation est considérée comme la mesure la plus importante et la plus efficace contre la fièvre jaune.
Selon les données de l’OMS : En 2019, le vaccin contre la fièvre faisait partie des programmes de vaccination systématique du nourrisson dans 36 des 40 pays et territoires à risque en Afrique et dans les Amériques. La couverture vaccinale dans ces 40 pays et territoires était estimée à 46 %.1
Malheureusement, le stock de vaccins est insuffisant pour répondre aux grandes épidémies. En 2016, cette question est passée au premier plan lors des grandes épidémies qui ont frappé plusieurs régions d'Afrique. C'est pourquoi Epicentre a entrepris des études cliniques sur l'immunogénicité et l'innocuité d'une dose du vaccin fractionnée à 1/5ème qui permettrait d'étirer les stocks limités et de protéger un plus grand nombre de personnes en cas d'épidémie.
Dose fractionnée contre la fièvre jaune
Etirement de l'approvisionnement en vaccins
En 2016, confrontée à de grandes épidémies urbaines dans plusieurs régions d'Afrique et à une pénurie de vaccins, l'Organisation mondial de la Santé (OMS) a formulé des recommandations concernant l'utilisation de doses fractionnées de vaccins contre la fièvre jaune sur la base des données disponibles en Amérique du Sud. A Kinshasa, en République démocratique du Congo, plus de 7 millions de personnes ont reçu cette dose fractionnée au 1/5ème.
Toutefois, des informations supplémentaires étaient nécessaires pour pouvoir utiliser des doses fractionnées avec l’ensemble des vaccins contre la fièvre jaune pré-qualifiés par l'OMS. En particulier, il est important de recueillir en Afrique des données sur la persistance des anticorps neutralisants et la performance de la dose fractionnée chez les jeunes enfants et les populations, y compris celles qui sont séropositives.
Afin de répondre à cette question Epicentre a conçu en collaboration avec l'Institut de recherche médicale du Kenya, l'Institut Pasteur de Dakar et l'Organisation mondiale de la santé (OMS) à Mbarara, en Ouganda, et à Kilifi, au Kenya, un essai clinique dont la 1ère phase randomisés en double aveugle s’est déroulé entre le 6 novembre 2017 et le 21 février 2018. Elle a inclus 960 adultes de 18 ans à 59 ans en Ouganda et eu Kenya qui ont reçu soit un cinquième de la dose, soit une dose standard de vaccin contre la fièvre jaune d’un des 4 vaccins pré-qualifiés par l’OMS : 7DD (Bio-Manguinhos/Fiocruz, Brésil), 17D-213 (Institut de la poliomyélite et des encéphalites virales, Entreprise unitaire fédérale de l'État de Chumakov, Russie), 17D-204 (Institut Pasteur de Dakar, Sénégal) et 17D-204 (Sanofi Pasteur, France). Les personnes ayant reçu un cinquième de la dose ont présenté une réponse immunologique non inférieure à celle induite par la dose standard. L’administration d’une dose partielle du vaccin contre la fièvre jaune s’avère donc efficace et pourrait permettre de vacciner plus de monde en situation d’urgence notamment.
Deux études complémentaires ont eu lieu pour évaluer l’efficacité des doses fractionnées chez les enfants ainsi que les adultes séropositifs au VIH.
Chez les enfants âgés de 9 mois à 59 mois, les résultats sont similaires à ceux précédemment montrés chez les adultes, avec des niveaux de séroconversion [NDLR : acquisition d'anticorps spécifiques suite de la vaccination] élevés à 28 jours et à un an. Cependant 10 jours après la vaccination, on observe une réponse immunitaire plus faible chez les enfants vaccinés avec une dose fractionnée. A ce stade, il est encore difficile d’en connaître les implications pratiques. les investigations se poursuivent donc. Parallèlement le suivi des enfants pendant 5 ans après la vaccination, se poursuit afin d’apporter des données supplémentaires sur la protection à plus long terme du vaccin, quel que soit la dose, et d’alimenter les recommandations de l’OMS à venir sur la durée de protection du vaccin.
Chez les personnes vivant avec le VIH, les doses fractionnées de vaccin contre la fièvre jaune ont apporté une protection non inférieure à celle des doses standard, ce qui permet d’affirmer que les recommandations relatives aux doses fractionnées peuvent être étendues aux personnes vivant avec le VIH.
Modification des recommandations
Sur la base des résultats obtenus, l'OMS devrait être en mesure de formuler des recommandations définitives sur l'utilisation de doses fractionnées de vaccins contre la fièvre jaune pour répondre aux besoins des campagnes conduites à grande échelle. Il s'agirait d'une étape importante pour Médecins Sans Frontières (MSF) et pour les autres ONG travaillant aux côtés des Ministères de la Santé afin de protéger davantage de personnes et arrêter la propagation de la maladie grâce à un meilleur usage des vaccins disponibles.
1 https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/immunization-coverage