Rapport Annuel 2021

Mercredi 8 juin 2022 - Mis à jour le Mardi 27 juin 2023
Décrire et analyser les situations sanitaires des populations secourues par les équipes médicales de MSF pour mieux orienter les programmes, mais aussi évaluer et comparer de nouvelles pratiques de soin pour proposer des solutions adaptées aux populations vivant dans des conditions instables ou ayant un accès insuffisant aux soins, sont les missions d’Epicentre qui ont guidé ses activités en 2021.

Editorial

Décrire et analyser les situations sanitaires des populations secourues par les équipes médicales de MSF pour mieux orienter les programmes, mais aussi évaluer et comparer de nouvelles pratiques de soin pour proposer des solutions adaptées aux populations vivant dans des conditions instables ou ayant un accès insuffisant aux soins, sont les missions d’Epicentre qui ont guidé ses activités en 2021.

L’épidémiologie pour comprendre et prioriser

La rareté des données épidémiologiques dans certaines contextes complique l’élaboration de réponses politiques prioritaires, et l’allocation de ressources adéquates. Par ses travaux d’enquête, Epicentre cherche à combler certaines de ces lacunes.

Ainsi au vu des données épidémiologiques recueillies, il semble difficile d’abonder sur la nécessité de vacciner 70 % de la population mondiale contre le Covid-19. Les données de nos études de séroprévalence confirment que le virus a circulé en Afrique et à un niveau plus élevé qu’observé par les systèmes d’information officiels. Mais son impact sur la morbidité et la mortalité n’ont pas atteint les niveaux observés ailleurs dans le monde.

Se pose alors la question de la place de la vaccination contre le Covid-19 par rapport aux autres risques sanitaires auxquels sont exposées les populations. Ainsi au Niger, les préoccupations se tournent plutôt vers la malnutrition, le paludisme ou les épidémies récurrentes de rougeole ou de choléra.

Dans un tout autre domaine, l’apport de l’épidémiologie a permis d’appuyer le projet de MSF sur la mise en place de soins simplifiés et décentralisés de l’hépatite C en montrant leur efficacité au Cambodge. Ce modèle qui repose sur l’utilisation de tests diagnostiques rapides, un nombre réduit de visites de suivi et d’examens biologiques, de molécules efficaces et le transfert de nombreuses tâches cliniques des médecins vers les infirmières et les pharmaciens peut être intégré dans les services publics et ruraux de santé dans des contextes à faibles ressources. Les résultats de ces travaux conjoints avec les équipes de MSF ont contribué à faire évoluer les recommandations de l’OMS sur ce sujet.

La recherche pour trouver des solutions adaptées

Conduire une recherche de qualité malgré les nombreuses contraintes (guerre, famine, épidémies, catastrophes naturelles ou déplacement de population) demeure complexe : cela repose sur la subtile association entre rigueur scientifique et capacités opérationnelles. Au-delà des études, indispensables pour démontrer le bien-fondé de nouvelles approches diagnostiques, préventives ou thérapeutiques, d’autres paramètres comptent pour qu’une solution réponde pleinement aux besoins des populations et aux contraintes des soignants. Si l’efficacité est centrale, la facilité d’emploi, la thermostabilité, les conditions de transport ou de stockage et la disponibilité à un coût abordable sont d’autres éléments clés.

Le projet sur le vaccin conjugué antipneumococcique (VPC 10), financé par EDCTP et lancé en 2021 compare l'impact et la faisabilité des campagnes de vaccination de masse avec une dose unique ou fractionnée de VPC10 au Niger.

L’essai FujiLAM effectué avec le soutien de l’ANRS et de MSF, vise à montrer l’efficacité et l’acceptabilité de ce test diagnostique de la tuberculose chez des personnes séropositives en Afrique du Sud, en Ouganda, au Mozambique et au Kenya. Ce test possède l’avantage d’être rapide et facile à utiliser, ne nécessite pas d’expectoration et peut être effectué en dehors d’un laboratoire.

Pour aller au-delà des avancées purement cliniques, Epicentre introduit de plus en plus les sciences humaines et sociales dans ses projets. Tout d’abord en couplant cette approche aux analyses quantitatives, comme lors de l’enquête dans les Ehpad pendant la 2e vague de Covid-19 réalisée en collaboration avec une sociologue ou lors du changement de traitement des patients sous antirétroviraux hospitalisés au Kenya et en RDC. Le lancement de l’étude sur l’effet de la stimulation psycho-sociale sur la récupération nutritionnelle au Niger marque une nouvelle étape dans cette démarche et s’inscrit dans les priorités stratégiques édictées en 2020 dont l’essor se poursuit. 

Emmanuel Baron, directeur d’Epicentre

 

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Epicentre en chiffres

Une centaine de projets en 2021

Où ?

  • Les 2/3 en Afrique, et sinon principalement en Asie et en Europe                                  

Sur quoi ?

  • Parmi les pathologies les plus étudiées, dans l’ordre décroissant figuraient le Covid-19, le VIH, Ebola, la tuberculose, le choléra, la rougeole.

Pour qui ?

  • Ces projets peuvent concerner la population dans sa globalité ou alors être ciblées sur une fraction de celle-ci comme les enfants, les adolescents, ou encore les femmes enceintes.

 

  •  373 personnes dont 59 % de personnels scientifiques et 41 % de personnels support
  • 42 nationalités

 

69 publications dans des journaux à comité de lecture

  • 36 % des publications avec 1er ou dernier auteur Epicentre
  • 16 % de Opinion Paper/Comments et 84 % d’articles
  • 22 % des articles avec Impact factor supérieur à 10 (dont les 4/5 avec un premier ou dernier auteur Epicentre)

 

17,4 M€ de ressources qui permettent à Epicentre de mener à bien les projets pour MSF, parmi lesquelles 11,1 M€ émanent de fonds collectés par MSF auprès du public et 6,3 M€ de bailleurs externes.

 

Quelques études marquantes 2021

Apporter des réponses transverses

En 2021, Epicentre a poursuivi ses activités d’épidémiologie qu’il s’agisse d’investigation d’épidémies, de la mise en place et de l’évaluation de systèmes de surveillance ou d’enquêtes de prévalence. Les données de ces enquêtes épidémiologiques permettent d’évaluer la situation, d’aider à la décision, d’évaluer l'efficacité d'un programme mais aussi de générer des hypothèses pour des recherches. Au travers d’études menées en population ou dans les structures de soins, Epicentre apporte des réponses possibles, concrètes et adaptées pour une meilleure prise en charge médicale préventive, diagnostique ou thérapeutique aux populations les plus vulnérables.

La nutrition : plus que jamais une priorité

nutrition_NigeriaAu Nigéria et à Madagascar, les enquêtes sur la malnutrition au sein des missions de MSF se poursuivent pour déterminer l’ampleur de la crise. Ces études permettent également de pointer les lacunes de certaines prises en charge et des pistes d’amélioration possibles afin de garantir une réponse plus globale aux situations d’urgence. Ainsi au Nigéria des études sur des modèles simplifiés de prise en charge de la malnutrition aiguë sévère chez les enfants ont été menées. Car malgré les améliorations, la couverture des programmes de traitement reste faible. Au nombre des obstacles figurent notamment l'éloignement des centres de soins ambulatoires et l’impact que cela représente pour les agents de santé. Un essai clinique mené au Nigeria par Epicentre avec MSF a révélé que, bien qu'un suivi hebdomadaire des enfants pris en charge soit préférable, un suivi mensuel peut être envisagé dans les contextes où un suivi plus fréquent est compliqué voire impossible.

Par ailleurs les enfants souffrant de malnutrition aiguë sévère sont exposés à un risque accru de mortalité par tuberculose. Or son diagnostic s’avère particulièrement difficile dans cette population. Une étude effectuée chez des enfants de moins de 5 ans hospitalisés pour une malnutrition aiguë sévère dans le centre de traitement de la malnutrition soutenu par MSF à Madaoua, au Niger, a mis en évidence le potentiel encourageant du test LAM, qui donne un résultat en 20 minutes à partir d’échantillons d'urine faciles à collecter.

Le choléra fait l’objet de plusieurs projets. S’il fait consensus qu’en réagissant rapidement face à l’apparition de nouveaux cas, les chances de freiner sa propagation sont démultipliées, les actions – antibiotique, vaccination orale, traitement de l’eau – et le périmètre de cette riposte demeurent sujets d’interrogation. Le projet CATI pour « Case-Area Targeted Intervention », élaboré en 2021 et qui a pu débuter en RDC en 2022, a pour but d’évaluer l’impact d’une réponse en fonction des actions mises en œuvre sur la transmission.

Toujours pour faire face aux épidémies, Epicentre a posé les jalons d’un essai en Guinée pour évaluer s’il était possible d’accroître l’intervalle, aujourd’hui de 14 jours, entre deux doses de vaccin oral contre le choléra. En effet, les épidémies surviennent le plus souvent dans des contextes d'insécurité ou de catastrophes naturelles, ce qui limite la possibilité d'administrer la deuxième dose dans le délai imparti.

Avec les équipes de MSF en RDC, Epicentre coordonne une vaste étude financée par le Wellcome Trust pour évaluer l’impact d’une campagne préventive de vaccination orale dans des zones à risque de choléra, avec le soutien du ministère de la Santé de RDC et du Programme National d'Elimination du Choléra et de lutte contre les autres Maladies Diarrhéiques (PNECHOL-MD). L’objectif est de suivre l'incidence du choléra après la vaccination pendant au moins deux ans, et de mieux comprendre l’impact du vaccin sur le niveau et les caractéristiques de la transmission de la maladie.

Covid-19 : mieux comprendre pour agir et réagir

Entre septembre 2020 et novembre 2021, Epicentre a mené plusieurs enquêtes de séroprévalence et de mortalité rétrospective au Cameroun, en Côte d’Ivoire, en RDC, au Yémen, au Mali, au Soudan, au Kenya et au Niger auprès de diverses populations. En raison du faible accès aux tests diagnostiques, les craintes d’une épidémie demeurée silencieuse, mais ayant entrainé des décès non répertoriés, demeuraient. Toutes les enquêtes montrent des proportions de personnes ayant été infectées par le virus plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines de fois supérieures aux taux d’attaque des cas confirmés dans ces pays. En outre les personnes séropositives rapportent plus souvent avoir eu au moins un symptôme associé au Covid-19 que les personnes séronégatives. Toutes les enquêtes mettent en évidence une hausse de la mortalité pendant la pandémie. Cette hausse est particulièrement élevée chez les plus de 50 ans. En dépit d’une population plus jeune, les personnes séropositives déclarent avoir ressenti des symptômes. Tout semble concourir en faveur d’une forte sous-détection et sous-notification des cas.

En fournissant des données sur le risque réel, ces enquêtes de séroprévalence peuvent notamment aider MSF et les ministères de la Santé à allouer au mieux les ressources entre Covid-19 et maladies à fort risque comme le paludisme ou la rougeole, mais aussi à identifier les groupes à cibler prioritairement en cas de prochaines vagues. Plus globalement elles doivent aussi poser la question de la valeur ajoutée d’une vaccination généralisée. En effet la population âgée et à risque est très peu nombreuse en Afrique, ce qui peut expliquer le plus faible nombre de mort rapportés et relativise la pertinence d’une action de vaccination ciblant tous les âges. De plus, cette stratégie détournerait des ressources déjà limitées, alors qu’un ciblage de la population à risque – les plus de 50 ans et le personnel médical – beaucoup moins nombreuse serait beaucoup plus efficient. Si la vaccination du personnel de santé et des personnes les plus vulnérables s’avère indispensable, des réponses locales et contextualisées semblent en revanche nécessaires pour le reste de la population.

 

Des réponses localisées au Covid-19

Au Niger, Epicentre accompagne le ministère de la Santé publique dans le suivi de la pharmacovigilance et de l’efficacité des vaccins contre le COVID19, Sinopharm, AstraZeneca et J&J.

En Ouganda, le centre de Mbarara est, quant à lui, partenaire de l’étude clinique ANTICOV coordonné par DNDi (Drugs for Neglected Diseases initiative) dont l’objectif est d’identifier des traitements pouvant être utilisés précocement pour éviter la survenue de forme sévère de Covid 19.

vaccin_precaireEn France, en partenariat avec Santé Publique France, Epicentre a mené la 1ère étude en Europe sur l’accès à la vaccination chez les sans-abris et migrants fin 2021. Les résultats de cette étude révélée au printemps 2022 ont mis en évidence que les personnes vivant dans la rue, des squats ou des bidonvilles, en centres d’hébergement ou en foyers de travailleurs étaient moins vaccinées que la population générale. Par ailleurs, plus les personnes sont exclues, moins elles ont eu accès à la vaccination : Ainsi 70% à 86% des personnes hébergées dans le Dispositif Pérenne, en hôtels ou en Foyer ont reçu au moins une dose de vaccin, mais seulement une personne sur deux vivant dans la rue. Ce constat démontre la nécessité de développer encore plus les stratégies « d’aller vers » et le rôle des tiers de confiance pour améliorer l’accès aux soins des populations en grande précarité.

 

Sans oublier les autres pathologies

Paludisme 

Epicentre poursuit son implication dans la lutte contre le paludisme en lien avec MSF et dans le cadre d’un consortium international coordonné par le MORU (Mahidol Oxford Tropical Medicine Research Unit). Ce dernier coordonne un projet mené sur 14 sites dont le centre de Maradi dans 8 pays d'Afrique et 5 pays d'Asie pour étudier l'efficacité, la sécurité et la tolérance de deux trithérapies combinées à base d’artémisinine (TACT) utilisant des médicaments antipaludiques existants (artéméther-luméfantrine + amodiaquine et artésunate-méfloquine + pipéraquine).

En RDC, avec MSF, il a été observé une forte diminution de la mortalité et de la morbidité chez les enfants de moins de 5 ans dans les zones où l'administration massive de médicaments est pratiquée, par rapport aux zones où elle ne l'est pas. Au Tchad, Epicentre évalue les programmes de chimioprévention saisonnière (CPS) du paludisme mis en œuvre par MSF et l’évolution des marqueurs génétiques de la résistance à la sulfadoxine-pyrimethamine et à l’amodiaquine afin de définir les meilleures stratégies à mettre en œuvre à l’avenir.

Mais Epicentre est aussi investi auprès de l’OMS à travers sa participation à l’élaboration des nouvelles directives parues en 2022 incluant entre autres l’ensemble des outils de prévention. Car en plus de la CPS, il existe désormais un vaccin. Quelle place pour ces stratégies préventives, seules ou en association pour les années à venir ? Il reste de nombreux défis à relever pour contrôler le paludisme comme la mise en œuvre de nouvelles stratégies préventives, diagnostiques, thérapeutiques, voire d’un vaccin efficace et peu coûteux.

VIH 

pêcheur_ougandaDe même Epicentre est impliqué dans plusieurs projets pour améliorer la vie des personnes vivants avec le VIH. Ainsi une étude d’Epicentre coordonnée pour MSF vise à déterminer le mode de délivrance le plus efficace et le plus accepté pour les communautés de pêcheurs itinérantes autour des lacs George et Edward en Ouganda. Mieux adapter la délivrance contribue à l’observance du traitement. Car comme le note une participante à l’enquête "Même quand je suis occupée, je suis sûre de recevoir des médicaments, contrairement à d'autres modes d’approvisionnement où l'on perd toute la journée à aller les chercher ; désormais, les médicaments arrivent à moi, apportés par des pairs. En outre, si vous êtes absent, il suffit d'un appel pour qu'un membre du groupe vous livre les médicaments à votre porte".

Deux autres études ont également permis de rappeler la nécessité d’améliorer l’accès au test de charge virale et au génotypage de résistance. Au Mozambique, l’étude a en effet montré que 90 % des patients en échec thérapeutique ont développé une résistance à au moins une des molécules antirétrovirales les plus utilisées. Et la double résistance Ténofovir/Lamivudine - deux molécules prescrites en combinaison avec le Dolutégravir en nouvelle première ligne - touche plus de la moitié des personnes en échec thérapeutique. Quant à l’autre étude menée dans un hôpital géré par MSF à Kinshasa en RDC et dans un hôpital soutenu par MSF à Homa Bay au Kenya, elle a mis en évidence que chez ¾ des patients hospitalisés à un stade avancé du VIH, deux des trois molécules de leur traitement antirétroviral étaient inefficaces, ce qui revenait pour ces patients à être traités en monothérapie.

 

Renforcer nos piliers et nos moyens

Ces avancées ne seraient pas possibles sans les ressources humaines et les compétences adéquates. Epicentre s’appuie sur un socle d’épidémiologistes secondés par des spécialistes de la science des données, des statisticiens, des moniteurs d’études cliniques, des spécialistes de la pharmacovigilance et du laboratoire.

Se doter des outils technologiques

L’équipe dédiée à la science des données développe les outils pour mieux définir les réponses et le suivi des épidémies. Des tableaux de bord pour suivre l’évolution d’Ebola, de la rougeole ou encore de la malnutrition et des maladies à déclaration obligatoire au Niger ont ainsi été mis en œuvre.  Aujourd’hui ces compétences en science des données sont reconnues et disponibles, et Epicentre ne cesse de consolider ses savoirs et son expertise dans ce domaine. En 2021, le projet sur la fièvre de Lassa a nécessité de renforcer les compétences dans ce domaine, dans les cinq pays d’Afrique de l’Ouest où il est déployé. Il s’agit aussi de s’assurer de l’adéquation de ces compétences avec les besoins opérationnels. L’équipe de science des données collabore ainsi étroitement avec MSF, pour élaborer les outils les mieux adaptés au suivi des épidémies, comme Ebola et la rougeole.

Pour faire face aux nombreuses évolutions, Epicentre collabore à des initiatives internationales visant à améliorer l'utilisation de méthodes d'analyse quantitative. Ainsi une connexion avec l’entité Data Science de l’OMS à Berlin est-elle d’ores et déjà envisagée.

A cela s’ajoute le développement de nouveaux outils technologiques : objets connectés pour le suivi des patients, apport des images satellites, IA etc. Pendant la pandémie de Covid-19, la télémédecine s’est répandue avec ses avantages et ses inconvénients à étudier. Une étude de MSF et Epicentre a évalué l'impact du passage à la télémédecine pour la prise en charge en santé mentale dans 44 pays suite à la pandémie. Cette approche ne semble pas être appropriée pour tous les patients dans les contextes étudiés, notamment pour les survivants de violences sexuelles ou interpersonnelles, en pédiatrie et en gériatrie, et pour les patients souffrant de graves problèmes de santé mentale.

Favoriser l’essor des Centres de recherche

Les centres de recherche du Niger ou de l’Ouganda sont un élément majeur d’Epicentre et participent largement à nouer des partenariats. Ils ne cessent de développer de nouvelles compétences et d’acquérir de nouveaux équipements, ce qui est essentiel pour relever le défi permanent du maintien de la qualité et des expertises, notamment en bactériologie et sur la tuberculose. 2021 a vu le renouvellement des partenariats avec l’Université à Maradi, avec le Centre de Formation et de Recherche en Médecine Tropicale de Niamey, avec la Mbarara University of Science and Technology.

pcr_NigerEn 2021, le centre de Maradi a complété son laboratoire de biologie moléculaire par l’acquisition d’une PCR et a développé Alert-Covid-19, une plate-forme électronique de surveillance et d’alerte. D’abord déployés pour faire face à la pandémie, ces moyens sont désormais utilisés pour des maladies à résurgence récurrente comme la rougeole et la méningite à méningocoque.

Le laboratoire du centre de Mbarara a quant à lui été accrédité GCLP (Good Clinical Laboratory Practice) par le système d'accréditation international et indépendant Qualogy. Cette accréditation devrait marquer une nouvelle étape dans son développement et son implantation en Ouganda et plus largement en Afrique de l’Est. Le centre est déjà un lieu reconnu pour ses recherches sur la tuberculose. Il participe à de nombreux essais sur cette pathologie dont l’essai Datura qui estime l'impact d'une phase initiale intensifiée du traitement de la tuberculose chez les adultes et les adolescents séropositifs, TB-speed qui vise à réduire la mortalité infantile, Intense TBM qui évalue l'efficacité de 2 stratégies pour réduire la mortalité due à la méningite tuberculeuse, contact TB qui compare deux modèles de prise en charge des cas contact chez les enfants, Rifashort qui étudie l’efficacité d’une réduction de la durée de traitement et FujiLAM qui évalue la performance d’un nouveau test diagnostique.

Ces évolutions renforcent la place des centres dans l’environnement local et international et leur domaine de compétence. A cela s’ajoute le renforcement des capacités des centres ce qui leur permet de porter des projets de manière plus autonome. D’autant plus qu’au Niger, le centre parraine la section Niger de “Organization for Women in Science in Developing Countries”, qui devrait faire émerger un réseau dans lequel les membres peuvent partager leurs idées et leurs expériences et trouver des opportunités de collaboration.

Renforcer les capacités

Transmettre et transférer les compétences aux personnels de MSF et in situ font partie intégrante des missions d’Epicentre. Les formations dispensées au personnel de MSF et au-delà en sont le point d’orgue. Ces dernières ont été très impactées par la pandémie de Covid-19 en 2021 et aucune formation « Populations en Situation Précaire (PSP) » n’a pu avoir lieu. En revanche la première formation « Diagnostic in Emergency Situations » sur les outils en épidémiologie et de la Medical Academy de MSF a été lancé avec MSF. Dans cette formation professionnelle pour futurs responsables médicaux, Epicentre est en charge du module consacré à l’épidémiologie et aux statistiques. L’objectif est de donner des bases fortes dans ces domaines aux responsables médicaux, leur permettant une analyse critique des situations sanitaires et favorisant la prise de décisions éclairées. Epicentre a aussi contribué au LEAP (Leadership Educational Academic Partnership), un programme de mastère conçu par des humanitaires pour des humanitaires, délivré conjointement par l’Université de Manchester et la Liverpool School of Tropical Medicine.

Mais nombre d’études participent également à l’amélioration des compétences à l’endroit où elle se déroule. Elles nécessitent souvent des dizaines de personnes avec des compétences spécifiques, ce qui implique un renforcement humain substantiel des capacités de recherche. Elles favorisent le déploiement ultérieur d’autres projets de recherche pour continuer à améliorer la santé des populations.

 

Relever les défis au profit de la santé des personnes les plus vulnérables

Pour répondre aux évolutions de notre environnement, l’organisation doit évoluer tout en maintenant son modèle au croisement de l’action humanitaire et de la recherche de niveau international. Il faut maintenir les liens déjà forts avec MSF pour construire des projets en commun et ainsi répondre pleinement aux besoins des populations.

En 2021, Epicentre a poursuivi son ouverture vers d’autres partenaires stratégiques afin de s’intégrer ou de développer des projets plus ambitieux. L’enjeu est de les renforcer, pour contribuer à augmenter l’attractivité et les compétences d’Epicentre. Ainsi la part des financements externes est-elle passée de 32 % en 2020 à 36 % en 2021

Collaborer pour améliorer l’accès et l’innovation aux populations vulnérables

Le projet visant à estimer l’incidence de la fièvre de Lassa s’est poursuivi en 2021. Financé par la CEPI (Coalition for Epidemic Preparedness Innovations), il implique de nombreux partenaires parmi lesquels P95, structure qui collecte, analyse et rapporte des données épidémiologiques pour aider les agences de santé publique, les organismes de recherche et les entreprises pharmaceutiques à améliorer l'accès des populations à des vaccins sûrs et efficaces, l'Institut Bernhard Nocht de médecine tropicale, le CDC du Nigeria, et se déroule dans cinq pays – Nigeria, Bénin, Sierra Leone, Liberia et Guinée – où cette fièvre hémorragique est endémique. Il devrait déboucher sur un essai vaccinal prochainement. Epicentre est aussi partenaire de deux projets coordonnés par DNDi et financés par EDCTP pour améliorer la prise en charge de la maladie du sommeil, l’un pour évaluer le fexinidazole pour le traitement de la forme la plus rare, et dont les inclusions viennent de se terminer, et l’autre qui débute pour étudier un traitement oral monodose pour la forme la plus courante. D’autres partenariats avec l’ANRS, EDCTP, PIH et Unitaid portent sur les projets sur la tuberculose dans le centre de Mbarara.

En 2021, Epicentre a reçu l’approbation et le financement du programme EDCTP2 soutenu par l'Union européenne, pour coordonner en collaboration avec plusieurs partenaires dont la London School of Hygiene and Tropical Medicine, le KEMRI-Wellcome Trust research program, et l’université Abdou Moumouni, un essai sur l'impact et la faisabilité de campagnes de vaccination de masse avec une dose unique et une dose fractionnée de PCV10 au Niger.

Ces partenariats qu’ils soit institutionnels ou financiers favorisent le développement d’études à visée thérapeutique, vaccinale ou diagnostique qui répondent à des enjeux de santé mondiale. Ils bénéficient aux populations vivant dans des conditions instables ou ayant un accès insuffisant aux soins.

Il s’agit aussi d’anticiper les évolutions et les risques. A quelles pathologies devrons-nous faire face demain ? Des maladies virales, bien sûr, mais il faut aussi compter avec la résistance antimicrobienne qui doit nous amener à repenser l’usage des antibiotiques et avec les maladies négligées qui, en raison des dérèglements climatiques, pourraient s’étendre bien au-delà des zones actuellement impactées. Se pose aussi la question des pathologies qui risquent d’émerger en lien avec le réchauffement climatique. D’ailleurs fin 2021, Epicentre s’est engagé dans une démarche de réduction de son empreinte carbone de 50 % d’ici 2030. Cet engagement vise à renforcer la durabilité de ses activités de formation, d’épidémiologie d’intervention et de recherche médicale auprès des populations vivant dans des conditions instables ou ayant un accès insuffisant aux soins, souvent les plus impactées par la crise climatique et qui en subissent d’ores et déjà les conséquences.

L’autre défi qui se profile concerne les maladies chroniques comme le diabète ou le cancer en plein essor sur le continent africain. Ce positionnement doit se faire en lien avec MSF afin de poursuivre nos activités d'épidémiologie de terrain et de recherche en appui de MSF. L’apport d’informations et de solutions pour améliorer l'accès à des soins de santé de qualité repose en effet sur le lien intangible qui nous unit à MSF et garantit notre autonomie.

 

crédit photo :Nicolas Guyonne/MSF, Harrison Fortune/MSF, DR

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