Réhydratation intraveineuse chez les enfants souffrant de malnutrition aiguë sévère : une étude apporte des éléments en faveur de son utilisation
Les enfants malnutris atteints de diarrhée souffrent souvent de déshydratation sévère et d'infections secondaires. Or les recommandations internationales sur la réhydratation des enfants atteints de malnutrition aiguë sévère (MAS) diffèrent de celles concernant les enfants réhydratés pour une gastro-entérite mais ne souffrant pas de malnutrition sévère : au lieu de recevoir des fluides par voie intraveineuse, les enfants atteints de MAS reçoivent des solutions de réhydratation par voie orale, souvent par l'intermédiaire d'une sonde nasogastrique. Cette recommandation s'appuie sur l’avis d'experts selon lequel les enfants atteints de MAS ont un cœur moins fonctionnel et pourraient ne pas tolérer une réhydratation par voie intraveineuse ou des solutions salines standard - qui peuvent, dans certains cas, entraîner des complications telles qu'une surcharge liquidienne et une insuffisance cardiaque. Ces recommandations pour la réhydratation des enfants atteints de SAM font l'objet d'un débat en raison de leur nature conservatrice. L'étude GASTROSAM visait à explorer différentes options de réhydratation pour ces enfants.
L'essai contrôlé randomisé, dirigé par le professeur Kathryn Maitland de l'Imperial College London's Institute of Global Health Innovation, publié dans le NEJM le 13 juin, a comparé la réhydratation orale standard à la réhydratation intraveineuse chez 292 enfants de moins de 12 ans, hospitalisés pour malnutrition aiguë sévère au Niger, au Nigéria, en Ouganda et au Kenya. La majorité des enfants ont été recrutés dans des sites où travaillent les équipes de Médecins Sans Frontières. Au Niger, l'étude a été supervisée par le centre Epicentre du Niger, en étroite collaboration avec MSF Suisse.
Les enfants éligibles à l'étude, dont les parents ont donné leur consentement éclairé et qui étaient gravement déshydratés, ont été répartis au hasard en trois groupes et ont reçu l'une des trois interventions :
- Soins standards actuels recommandés par l'Organisation Mondiale de la santé (OMS), basés sur la réhydratation orale et l'utilisation de fluides intraveineux uniquement en cas de choc (contrôle).
- Réhydratation rapide par voie intraveineuse, généralement utilisée pour les enfants non dénutris.
- Réhydratation intraveineuse lente, le même volume de liquide que pour la réhydratation intraveineuse rapide, mais administré lentement.
Points clés de cette étude
L'essai n'a pas pu mettre en évidence une réduction de la mortalité après 96 heures avec les stratégies de réhydratation par voie intraveineuse par rapport à la stratégie de contrôle standard. Il est à retenir que la mortalité globale des enfants participant à l'essai a été plus faible que prévu, très certainement en raison des soins intensifs et de la surveillance étroite dont ils ont fait l'objet pendant l'essai.
Par ailleurs, les stratégies de réhydratation par voie intraveineuse n'ont pas montré de signes apparents d'effets néfastes. En outre, la stratégie orale standard impliquait souvent l'utilisation d'une sonde nasogastrique pour administrer les liquides de réhydratation, ce qui était associé à un plus grand nombre d'épisodes de vomissements et de chocs.
Les résultats de l'essai indiquent donc que la réhydratation intraveineuse peut être administrée en toute sécurité aux enfants souffrant de malnutrition aiguë sévère, ce qui suggère qu'une réévaluation des directives mondiales semble justifiée.
©Oliver Barth