Paludisme
Améliorer la prévention, le diagnostic et le traitement.
Le paludisme est provoqué par différents types de parasites nommés Plasmodium : ce sont des parasites unicellulaires, transmis à l'homme par les moustiques. En 2016, on estimait à 216 millions le nombre de cas de paludisme et à 445 000 le nombre de décès dus au paludisme dans le monde. L’Afrique comptabilise à elle seule plus de 90 % des cas et des décès, et la maladie y est particulièrement mortelle pour les enfants de moins de 5 ans1.
Au début des années 2000, des progrès ont été réalisés grâce à l’utilisation à grande échelle de moustiquaires imprégnées d'insecticide et à l'introduction de médicaments combinant plusieurs molécules actives dont un dérivé de l’artémisinine. Ces interventions ont considérablement fait chuter le nombre de décès entre 2000 et 2015, pour ensuite aujourd’hui se stabiliser. Le paludisme est la maladie qui occupe le premier rang des morbidités chez Médecins Sans Frontières (MSF) : l’organisation a traité 2 536 400 cas de paludisme en 2016, ce qui représente plus d'un quart des consultations externes de MSF dans l’ensemble du monde2, et justifie pleinement l'engagement d'Epicentre dans ce domaine.
Les contributions d'Epicentre se sont concentrées sur le diagnostic, le traitement et la prévention du paludisme dans les programmes de MSF dont les interventions se situent dans de nombreux et différents contextes, tous différents.
Chimioprévention du paludisme saisonnier (CPS) et autres distributions de masse de médicaments
Suivi et évaluation du programme

Epicentre a accompagné MSF lors du déploiement de la chimioprévention du paludisme saisonnier (CPS) dans le Sahel, une nouvelle stratégie destinée aux enfants de moins de 5 ans. Un traitement prophylactique leur est dispensé une fois par mois pendant la saison des pluies, lorsque le risque de paludisme est élevé3. Epicentre a réalisé des études sur la couverture des programmes de CPS mis en œuvre par MSF en Guinée-Bissau, au Mali, au Niger et au Tchad, et a apporté ses conseils pour la poursuite du déploiement de la CPS4.
Pour protéger les populations vulnérables, MSF a mis sur pied un programme de traitement préventif pour les enfants de moins de 15 ans dans un camp de réfugiés du nord de l'Ouganda. Nous avons réalisé une série d'études pour décrire cette intervention5.
Surveillance de la résistance
Épidémiologie descriptive

Avec la CPS (décrite ci-dessus), l’un des risques est que les parasites du paludisme pourraient devenir résistants aux médicaments utilisés dans la stratégie de chimioprévention. L'Organisation mondial de la Santé (OMS) recommande une surveillance de routine dans les zones où la CPS est mise en œuvre. Pour ce faire, les gènes des parasites du paludisme sont soumis à des tests en laboratoire afin d’identifier ceux qui pourraient être résistants aux médicaments. Epicentre a effectué à cet effet des études au Tchad et au Niger6.
Améliorer le diagnostic
Épidémiologie analytique
Les tests de diagnostic rapide (TDR) du paludisme ne nécessitent pas de laboratoire spécialisé et sont largement disponibles sur le terrain. Nous avons évalué plusieurs types de tests de diagnostic rapide (notamment HRP2 et pLDH) pour voir lesquels sont les mieux adaptés aux différents contextes. Une étude réalisée en Ouganda a montré que les tests HRP2 continuaient à donner un résultat positif jusqu'à 6 semaines après un traitement7, ce qui laisse entendre qu'on devrait éviter de les utiliser dans les zones à forte transmission où une réinfection précoce serait fréquente.
Suivi des interventions
Études cas-témoins et études de cohortes
Après le déploiement de la stratégie CPS à Magaria au Niger, des doutes sont apparus sur l’efficacité de ce programme car les hôpitaux restaient encore surchargés par des enfants atteints par le paludisme. En 2016, Epicentre a entrepris une étude cas-témoins prospective pour évaluer l'efficacité protectrice de la CPS contre une épidémie de paludisme. Les doutes portaient sur la mauvaise observance du traitement de trois jours à domicile. C’est pour cette raison que les concentrations sanguines des médicaments utilisés dans la CPS ont été vérifiées. Les principaux résultats ont montré que la CPS fonctionne généralement bien, malgré les preuves révélant que le traitement était très peu respecté.
Amélioration des stratégies thérapeutiques
Essais sur le terrain et essais cliniques
Epicentre a récemment réalisé et participé à plusieurs essais cliniques concernant le traitement du paludisme.
- Au Niger, une étude a évalué trois ACT couramment utilisés pour le traitement du paludisme non compliqué et a constaté que tous trois présentaient une bonne efficacité8.
- Le traitement du paludisme chez les enfants malnutris peut s’avérer difficile. Lors d'un essai clinique réalisé au Mali et au Niger, l'association artéméther-lumefantrine s'est révélée aussi efficace chez les enfants malnutris que ceux qui n'étaient pas malnutris, mais les dosages sériques des médicaments étaient significativement inférieurs chez les enfants malnutris, ce qui peut les rendre plus susceptibles à une ré-infection9.
- La mortalité chez les enfants atteints de paludisme grave est élevée. Epicentre était l'un des 11 sites de l'étude AQUAMAT qui a démontré que, comparé à la quinine, le traitement à l’artésunate par voie intraveineuse réduisait de 22 % la mortalité due au paludisme grave10. Cet essai a entraîné une modification des recommandations de l'OMS pour le traitement du paludisme grave.
- Même avec l'artésunate, la mortalité due au paludisme grave reste élevée, ce qui justifie la nécessité des traitements d'appoint. Dans un essai, nous avons testé l’hypothèse selon laquelle, en plus des soins standards, l'inhalation d'oxyde nitrique pourrait réduire la mortalité, mais, malheureusement, cette hypothèse n’a pas été confirmée11.
Ressources sélectionnées
Prévalence de la parasitémie dans une zone de chimio-prévention saisonnière du paludisme - Coldiron M - Poster 2018 (EN)
Efficacité protectrice de la chimio-prévention du paludisme saisonnier à Magaria, Niger - Coldiron M - Poster 2018 (EN)
Chimioprévention du paludisme saisonnier : histoire, justification et enjeux - Coldiron M - Video 2017 (EN)
Chimioprévention du paludisme saisonnier : histoire, justification et enjeux - Coldiron M - Abstract 2017 (EN)
Publications sélectionnées
Seasonal malaria chemoprevention: successes and missed opportunities.
Intermittent preventive treatment for malaria among children in a refugee camp in Northern Uganda: lessons learned.
Molecular markers of resistance to amodiaquine plus sulfadoxine-pyrimethamine in an area with seasonal malaria chemoprevention in south central Niger.
Performance and time to become negative after treatment of three malaria rapid diagnostic tests in low and high malaria transmission settings.
Efficacy of artesunate-amodiaquine, dihydroartemisinin-piperaquine and artemether-lumefantrine for the treatment of uncomplicated Plasmodium falciparum malaria in Maradi, Niger.
Artesunate versus quinine in the treatment of severe falciparum malaria in African children (AQUAMAT): an open-label, randomised trial.
Inhaled Nitric Oxide as an Adjunctive Treatment for Cerebral Malaria in Children: A Phase II Randomized Open-Label Clinical Trial.
Références
1 WHO. World Malaria Report 2017 [Internet]. World Health Organization. Geneva; 2017. doi:10.1071/EC12504
2 Médecins Sans Frontières. International Activity Report 2016 [Internet]. Geneva; 2016. Available: http://www.msf.org/sites/msf.org/files/msf_activity_report_2016_web.pdf
3 WHO Global Malaria Programme. WHO policy recommendation: Seasonal Malaria Chemoprevention for Plasmodium falciparum control in highly seasonal transmission areas of the Sahel sub-region in Africa. Geneva; 2012.
4 Coldiron ME, Von Seidlein L, Grais RF. Seasonal malaria chemoprevention: Successes and missed opportunities. Malar J. 2017;16. doi:10.1186/s12936-017-2132-1
5 Coldiron ME, Lasry E, Bouhenia M, Das D, Okui P, Nyehangane D, et al. Intermittent preventive treatment for malaria among children in a refugee camp in Northern Uganda: lessons learned. Malar J. 2017;16. doi:10.1186/s12936-017-1869-x
6 Grais RF, Laminou IM, Woi‑messe L, Makarimi R, Bouriema SH, Langendorf C, et al. Molecular markers of resistance to amodiaquine plus sulfadoxine– pyrimethamine in an area with seasonal malaria chemoprevention in south central Niger. Malar J. 2018;17. doi:10.1186/s12936-018-2242-4
7 Grandesso F, Nabasumba C, Nyehangane D, Page A-L, Bastard M, De Smet M, et al. Performance and time to become negative after treatment of three malaria rapid diagnostic tests in low and high malaria transmission settings. Malar J. BioMed Central; 2016;15: 496. doi:10.1186/s12936-016-1529-6
8 Grandesso F, Guindo O, Woi Messe L, Makarimi R, Traore A, Dama S, et al. Efficacy of artesunate-amodiaquine, dihydroartemisinin-piperaquine and artemether-lumefantrine for the treatment of uncomplicated Plasmodium falciparum malaria in Maradi, Niger NCT01755559 NCT. Malar J. 2018;17. doi:10.1186/s12936-018-2200-1
9 Denoeud-Ndam L, Dicko A, Baudin E, Guindo O, Grandesso F, Diawara H, et al. Efficacy of artemether-lumefantrine in relation to drug exposure in children with and without severe acute malnutrition: an open comparative intervention study in Mali and Niger. BMC Med. 2016;14. doi:10.1186/s12916-016-0716-1
10 Dondorp AM, Fanello CI, Hendriksen IC, Gomes E, Seni A, Chhaganlal KD, et al. Artesunate versus quinine in the treatment of severe falciparum malaria in African children (AQUAMAT): An open-label, randomised trial. Lancet. 2010;376: 1647–1657. doi:10.1016/S0140-6736(10)61924-1
11 Mwanga-Amumpaire J, Carroll RW, Baudin E, Kemigisha E, Nampijja D, Mworozi K, et al. Inhaled Nitric Oxide as an Adjunctive Treatment for Cerebral Malaria in Children: A Phase II Randomized Open-Label Clinical Trial. Open forum Infect Dis. Oxford University Press; 2015;2: ofv111. doi:10.1093/ofid/ofv111