De nouvelles données révèlent des niveaux de malnutrition extrêmement critiques dans certaines régions du nord-ouest du Nigeria
L'enquête menée dans les localités de Katsina, Jibia et Mashi montre qu'une crise nutritionnelle majeure est en cours avec plus de 30% des enfants souffrant de malnutrition aiguë globale (MAG) dans certaines zones et des taux de malnutrition aiguë sévère (MAS) entre 6,8% et 14,4%. Les habitants de ces régions se trouvent au niveau « extrêmement critique » de malnutrition aiguë selon l’échelle standardisée de la sécurité alimentaire, l’IPC. Médecins Sans Frontières (MSF) a continué à observer une augmentation des admissions pour malnutrition depuis la fin de l’enquête.
Epicentre conduit cette enquête depuis 2022, à la même période, dans les mêmes zones et avec la même méthodologie pour estimer la prévalence de la malnutrition aiguë chez les enfants âgés de 6 à 59 mois. Leur état nutritionnel a été évalué à l'aide d'une combinaison de trois mesures anthropométriques : le périmètre brachial, la présence d’œdèmes et le rapport poids/taille. La première enquête faisait état de taux de malnutrition aiguë globale de 22%.
« Les résultats de cette enquête sont terrifiants. Nous avons vu les chiffres augmenter régulièrement au cours des deux dernières années. Dans la zone de Mashi, 14 % des enfants que nous avons vus souffraient de malnutrition aiguë sévère. Une prévalence aussi élevée est catastrophique. Nous avons besoin de plus d’action de la part des organisations, sans quoi nous verrons mourir un nombre sans précédent d’enfants », déclare le Dr Raphael Kananga, coordinateur médical de MSF.
Par ailleurs, au début de l’année, MSF a effectué un dépistage de masse dans plusieurs régions de l’Etat de Zamfara, situé également au nord-ouest du pays, et a constaté que 27% des enfants souffraient de malnutrition aiguë.
MSF, qui gère quatre centres de prise en charge nutritionnelle thérapeutique pour les enfants malnutris dans l’Etat de Katsina, a admis cette année plus d’enfants que les années précédentes, dans un état de malnutrition plus avancé et nécessitant plus d’hospitalisations. Depuis janvier, nos équipes ont pris en charge plus de 100 000 enfants malnutris, 20% de plus qu’à la même période en 2023. Les admissions à l’hôpital ont augmenté de plus de 50% par rapport à 2022 et 2023, et plus de 800 enfants sont arrivés dans un état de malnutrition trop avancé et sont décédés dans les structures de MSF entre janvier et septembre 2024.
Cette tendance est observée dans toutes nos structures nutritionnelles du nord du pays : dans sept États du nord du Nigeria, MSF a soigné 294 000 enfants contre la malnutrition entre janvier et septembre de cette année, soit 43% de plus qu’à la même période en 2023.
Les projections, anticipant une prochaine détérioration de la sécurité alimentaire, sont très inquiétantes : l’inflation est très élevée au Nigeria, la dévaluation de la monnaie locale se poursuit et les rendements agricoles ont fortement diminué cette année. Le coût de la vie augmente, l’insécurité persiste dans plusieurs zones de la région. A cela s’ajoutent les événements climatiques qui ont un impact sur le bétail et les cultures. Tous ces facteurs font craindre une situation catastrophique encore plus meurtrière en 2025 si aucune aide supplémentaire n’est mise en place, d’autant plus que l’Etat de Katsina et la région nord-ouest du pays n’est pas inclus dans le plan d’intervention humanitaire des Nations unies pour le Nigeria.
Les coupes budgétaires à l’échelle globale réduisent également la capacité des organisations à répondre à la crise et soigner les enfants souffrant de malnutrition. Les quantités insuffisantes d’aliments thérapeutiques disponibles ont constitué un défi au cours de l’année écoulée - une situation qui continue de s’aggraver.
MSF gère des projets de prise en charge de la malnutrition dans sept États du Nigeria : Borno, Bauchi, Katsina, Kano, Sokoto, Zamfara et Kebbi. Ces projets incluent 10 centres d'hospitalisation, dont ceux de Maiduguri et de la ville de Katsina, et plus de 30 centres ambulatoires dans ces États pour soigner les enfants souffrant de malnutrition aiguë modérée et sévère qui n'ont pas besoin d'être hospitalisés.
©Abba Adamu Musa