Mariama Issoufou Adamou: un leitmotiv, comprendre et lutter contre la malnutrition au Niger
Sur quoi portait votre présentation au congrès de l’OWSD, ce programme de l’Unesco pour promouvoir la place des femmes en science ?
Mariama Issoufou Adamou : L'objectif principal de mon étude était de recueillir des informations sur les connaissances, les attitudes et les pratiques en matière de nutrition chez les enfants de moins de 2 ans dans le village de Dan Kori qui se trouve dans la région de Maradi. Cette région est l’une des plus touchées au Niger par la malnutrition avec une prévalence de 11,4 %. Lors de mon master en nutrition effectué après mes études de médecine, j’ai donc cherché à mieux comprendre pourquoi cette région du Niger était tant touchée par la malnutrition, en explorant les comportements des habitants de ce village composé principalement d’agriculteurs.
Quasiment toutes les femmes pratiquent l'allaitement dans l'heure qui suit la naissance et continuent d'allaiter leur enfant après 6 mois. Cependant l'introduction précoce d’une autre nourriture est pratiquée chez les ¾ des enfants dans cette localité, car les mères pensent que le lait maternel seul ne suffirait pas. En raison du manque de céréales et de leur faible diversité, les enfants tombent facilement dans la malnutrition. Ce constat nous a amené à pratiquer des sessions de sensibilisation pour changer certaines pratiques et les encourager à développer des cultures assurant une diversification alimentaire.
Quel a été votre parcours avant de rejoindre Epicentre ?
MIA : J’ai effectué mes études de médecine de 2007 à 2015 à l’université Abdou Moumouni Dioffo de Niamey. S’en est suivi un contrat de 3 mois avec MSF auprès des enfants atteints de paludisme et malnutris qui a été en quelque sorte le déclencheur de mon intérêt pour les problèmes de malnutrition. J’ai ensuite décidé d’effectuer un master à la faculté d’agronomie toujours à l’université Abdou Moumouni Dioffo qui a fait l’objet des travaux présentés au congrès de l’OWSD. Alors lorsque j’ai vu qu’Epicentre recherchait un médecin pour travailler sur les études nutritionnelles, j‘ai immédiatement postulé et depuis janvier j’ai donc rejoint le Centre de Maradi.
Sur quoi travaillez-vous actuellement ?
MIA : Nous sommes en train de poser les bases en vue du lancement d’une vaste étude qui évaluera un nouvel aliment thérapeutique prêt à l’emploi chez les jeunes enfants atteints de malnutrition aiguë sévère. Jusqu’à présent on administre aux enfants malnutris du Plumpy’Nut composé d’arachides, de sucre, de matières grasses végétales, de poudre de lait écrémé et d’un complexe minéral et vitaminique. Or si les enfants semblent récupérer en termes de masse corporelle, leur flore intestinale demeure altérée, ce qui semble avoir un impact sur leur croissance à long terme.
L’adjonction de banane verte et de pois chiche à la formule de base a montré des effets positifs lors d’un essai au Bangladesh. L’étude de cette nouvelle formulation d’aliment thérapeutique est donc envisagée au Niger dans la région de Maradi. Elle portera aussi bien sur les effets en termes de croissance que sur le microbiote chez les enfants. Nous étudions pour le moment la faisabilité de cette étude qui pourrait, si tout se passe bien, débuté l’année prochaine.