Tuberculose : bonne sécurité et efficacité des traitements à base de bedaquiline ou delamanid, administrés seuls ou en simultané
Aujourd’hui l’un des enjeux majeurs pour enrayer la tuberculose réside dans le traitement des formes résistantes, c'est-à-dire des formes de la maladie pour lesquelles les médicaments de première intention ne sont pas efficaces. De plus en plus fréquente, ces formes de tuberculose ne disposaient jusqu’à récemment que de traitements longs, peu efficaces et provoquant d’importants effets secondaires, tels que des surdités permanentes. Récemment, deux antibiotiques, la bedaquiline et/ou le delamanid, ont fait la preuve de leur efficacité pour traiter la tuberculose multirésistante. En outre, ces deux molécules sont administrées oralement, contrairement à certains traitements précédents qui étaient injectables. Bien que l’OMS a recommandé l'utilisation de ces médicaments, il reste encore du chemin pour améliorer leur accès, mais aussi mieux comprendre leurs actions en interaction avec d’autres médicaments. C’est l’objet du projet endTB (pour Expand new drug markets for TB) qui associe MSF, Partners In Health (PIH) et Interactive Research and Development (IRD) autour d’un financement d’Unitaid. Dans ce cadre, Helena Huerga, épidémiologiste à Epicentre, coordonne une étude observationnelle qui a suivi 2300 patients dans 17 pays* pour évaluer la sécurité et l'efficacité de la bédaquiline et du delamanid, administrés seuls ou simultanément avec d'autres molécules antituberculeuses de seconde ligne.
« L'étude observationnelle endTB est une vaste étude prospective qui a recueilli des données de haute qualité auprès de patients atteints de tuberculose multirésistante dans des contextes variés », déclare Helena Huerga.
Evaluer l'efficacité mais aussi la sécurité des nouvelles combinaisons thérapeutiques
« Parmi près de 2 300 patients ayant reçu soit de la bédaquiline, soit du delamanid dans le cadre d'un traitement contre la tuberculose multirésistante, les effets indésirables cliniquement importants les plus fréquents ont été une neuropathie périphérique chez 26,4 % des patients, une déplétion électrolytique chez 26 % des patients et une perte d'audition chez 13,2 % des patients », explique Cathy Hewison, conseillère de MSF pour la tuberculose et également investigatrice dans cette étude.
Les événements indésirables semblent le plus souvent observés chez patients qui ont reçu aussi des médicaments injectables (kanamycin, amikacin and capreomycin) et du linézolide. Ces données confortent donc les nouvelles directives de l'OMS qui limitent l’usage des médicaments injectables pour des cas exceptionnels seulement.
« Ce que l’on peut retenir de cette étude sur la plus grande cohorte de patients traités par bédaquiline et delamanid à ce jour, c’est la bonne innocuité de ces deux molécules pour traiter la tuberculose résistante, note Helena Huerga. Ce qui devrait aussi avoir des répercussions sur l’arrêt précoce des traitements souvent motivés par les effets indésirables. »
Se posait aussi la question de la sécurité et de l’efficacité de l’administration concomitante de la bédaquiline et du delamanid, une alternative considérée comme prometteuse pour traiter les patients infectés par des souches de tuberculose résistante ou qui ne peuvent pas tolérer d'autres thérapies. « Dans l'étude observationnelle endTB, 472 patients ont reçu ces deux médicaments concomitamment avec d'autres antituberculeux de seconde ligne comme le linézolide et la clofazimine, et ont été suivis jusqu'à la fin de leur traitement. Nos résultats sont rassurants quant au risque cardiotoxique potentiel de l'administration de ces deux molécules », conclut Helena Huerga. L'utilisation concomitante de la bédaquiline et du delmanide dans le cadre de traitements contre la tuberculose multirésistante est non seulement sûre, mais aussi efficace pour traiter les patients dont la maladie est étendue. L'administration simultanée de ces deux molécules est une bonne option thérapeutique pour les patients présentant une résistance à de nombreux médicaments antituberculeux.
Les études se poursuivent désormais pour déterminer les effets indésirables de ces deux molécules administrées concomitamment et chez les enfants.
* Armenia, Bangladesh, Belarus, Ethiopia, Georgia, Haiti, Indonesia, Kazakhstan, Kenya, Kyrgyzstan, Lesotho, Myanmar, Pakistan, Peru, Corée du Nord, South Africa, and Vietnam
crédit photo : Bithin Das